La semaine de 4 jours en chiffres

S’il est un sujet dont on nous rebat les oreilles depuis plusieurs mois, c’est la semaine de 4 jours. Il y a les pour, il y a les contres et chaque média, y va de son analyse pour défendre sa vision. Afin de vous-même vous faire votre propre choix, je vous propose un tour d’horizon des tests réalisés un peu partout dans le monde et une analyse des avantages et inconvénients de la semaine de quatre jours.

La semaine de 4 jours : une transformation du monde du travail en plein essor

La semaine de 4 jours sans perte de salaire s’impose progressivement comme une réforme organisationnelle majeure. Expérimentée à travers plusieurs pays, elle est motivée par des objectifs de bien-être, de productivité et d’impact environnemental. Mais quelles sont les réalités concrètes de cette mutation ?

Les modèles européens : des approches diversifiées

Islande : un pionnier révélateur

L’Islande a mené entre 2015 et 2022 la plus grande expérimentation publique sur la semaine réduite, impliquant 2 500 fonctionnaires puis 13 000 travailleurs. Résultat : une amélioration de 86 % du bien-être professionnel et une augmentation de la productivité dans 75 % des services publics. 86 % des actifs islandais ont adopté ce modèle durablement. Cela laisse rêveur.

semaine de 4 jours photo

Royaume-Uni : un test grandeur nature

En 2022, 61 entreprises britanniques ont testé la semaine de 4 jours sur 2 900 salariés. Six mois plus tard, 92 % des organisations ont adopté ce régime de façon permanente. Les cas de burn-out ont chuté de 71 %, et 55 % des entreprises ont enregistré une croissance supérieure aux projections.

Belgique : une flexibilité limitée

Depuis 2022, la Belgique autorise une répartition condensée des heures de travail sur 4 jours. Toutefois, seuls 0,8 % des salariés ont adopté ce dispositif, freinés par des contraintes sectorielles.

Amérique du Nord : des dynamiques contrastées

États-Unis : un engouement porté par les startups

59 % des entreprises américaines envisagent une transition vers la semaine de 4 jours. 42 % des startups de la Silicon Valley l’ont déjà adoptée, réduisant leurs coûts immobiliers de 34 % et augmentant la rétention des talents de 22 %.

Canada : une adoption décentralisée

Les expériences varient selon les provinces. En Ontario, 74 municipalités ont instauré un vendredi chômé un sur deux, réduisant la consommation d’énergie de 12 %. Au Québec, le programme 4@work a conduit 63 % des PME à adopter une semaine annualisée.

Océanie et Asie : des résultats inégaux

Australie : une réussite économique

Un test mené en 2022–2023 sur 26 entreprises a augmenté leur chiffre d’affaires annuel de 36 % et réduit les absences maladie de 44,3 %.

Japon : une réponse au karoshi

Face à l’épidémie de décès pour surmenage (Karoshi), en 2023, le gouvernement japonais a instauré un “vendredi premium” optionnel, réduisant les heures supplémentaires de 18 % et les dépressions professionnelles de 14 %.

LDLC : Le cas Français de la semaine de 4 jours

En France, l’un des symboles de la semaine de quatre jours est la société LDLC fondée par Laurent De La Clairegerie. Suite à la découverte de la semaine de quatre jours et ses effets bénéfiques sur les différentes expériences réalisées dans le monde entier, Laurent De La Clairegerie a décidé de tester la semaine de quatre jours sur ses collaborateurs. Ainsi, il a instauré une semaine de quatre jours sur 32 heures hebdomadaire sans réduction salariale pour l’ensemble de ses 1064 salariés en 2021.

Une réussite pour Laurent De La Clairegerie et ses salariés

Selon Laurent De La Clairegerie, la productivité aurait augmenté de 40%. Cette affirmation s’appuie notamment sur des indicateurs internes tels que les rendez-vous commerciaux ou le traitement des commandes. L’un des points forts de cette expérience se trouve au niveau des ressources humaines puisque le turnover est passé de 10,4% en 2018 à 3,78% en 2022. Cette baisse s’expliquant notamment par l’amélioration de la qualité de vie réduisant ainsi les démissions volontaires. En parallèle, la société a constaté une forte augmentation des candidatures spontanées passant de 3 à 5 cv par semaine avant 2021 à 15 à 20 cv par semaine ensuite.

Une réalité financière moins flatteuse pour les 4 jours chez LDLC

Pas sûr que la semaine de quatre jours soit le seul facteur, mais la réalité financière est bien moins joyeuse que ce dont on parlait pour les ressources humaines. Les effets bénéfiques sont à contraster avec un chiffre d’affaires en baisse de 5,4% sur l’exercice 2021–2022 avec une tendance qui s’est accentuée en 2023–2024, soit une baisse de 16,5% en 3 ans.

De plus, le coût estimé de la semaine de quatre jours serait de 1,4 million d’euros pour LDLC, soit 5% de la masse salariale, impactant fortement la profitabilité déjà fragile, avec notamment un résultat net négatif de 200 000 euros pour l’exercice 2023–2024.

Enfin, les investisseurs n’ont pas du tout goûté la plaisanterie puisque l’action est passée de 68,9 € en juillet 2021 à 8,96 € en 2025, soit une paire de 87 % de sa valeur. Il est évident que ce n’est pas le seul facteur, mais la réalité, c’est que les bénéfices de la semaine de 4 jours sont à tempérer.

la semaine de 4 jours en photo

Semaine de 4 jours et impact collatéraux

La synthèse des nombreuses expériences réalisées dans le monde entier montre bien que la semaine de quatre jours a un véritable impact social, mais ce n’est pas le seul impact positif de cette approche du travail. A Valence, il a notamment été noté une chute de 9% du trafic routier et en Allemagne, on a pu constater une baisse de 17% de la consommation énergétique des entreprises participantes. Enfin, une étude de Work less Pollute less estime que la généralisation de cette pratique permettrait de réduire les émissions de CO2 du secteur tertiaire de 8,6% et de 21% en matière de production de déchets de bureau.

La semaine de 4 jours, un format difficilement transposable au-delà du tertiaire

De toute évidence, la semaine de quatre jours est un format assez aisé à mettre en place pour les fonctions support et le domaine du tertiaire, mais son efficacité reste encore à prouver, notamment dans les secteurs de l’industrie manufacturière et de la logistique. Il a notamment été rapporté après des essais en Nouvelle-Zélande que l’industrie manufacturière a vu sa production horaire chuter de 12% et en Afrique du Sud qu’une seule entreprise sur 57 a maintenu ce dispositif après le test.

Par ailleurs, ce format prête à questionnement en ce qui concerne l’équité dans des entreprises où les fonctions support pourraient travailler quatre jours, mais où les fonctions opérationnelles de type opérateur de production, chauffeur poids lourds ou préparateur de commande n’auraient pas la possibilité d’y avoir recours.

Perspectives d’avenir

De toute évidence, le monde du travail évolue et les salariés ont des attentes bien différentes. Aujourd’hui, et la semaine de quatre jours, répond fortement à ces évolutions du marché de l’emploi. C’est un levier particulièrement fort au niveau attractivité et ressource humaine, comme les différents exemples l’ont montré. Avant de se lancer dans un tel modèle, des formats hybrides peuvent être testés.

Exemple :

  • Alternance : Une semaine de 4 jours puis une semaine de 5 jours
  • Semaine annualisée : 45 heures en haute saison et 25 heures hebdomadaires en basse saison. Format déjà utilisé dans les secteurs très saisonniers
  • Le “staggered work” : ce système permet aux salariés de choisir leur plage de présence
  • Les “summer friday” : Inspiré de Wall street, ce format propose aux salariés les vendredis libres ou raccourcis de juin à août
  • La “jornada intensiva” : pratiquée en Espagne de juin à septembre, elle propose aux salariés des journées continues de 8h à 15h sans pause déjeuner. Format qui séduit 68% des travailleurs ibériques.
  • Les horaires variables éducatifs : Testé par MAIF, ce modèle parental permet de commencer à 9h30 après le dépôt des enfants et de bloquer deux heures l’après-midi pour les activités périscolaires. Cette flexibilité a boosté la fidélisation des collaborateurs de 27%.

Conclusion

Bien que très séduisante, la semaine de quatre jours n’est pas la réponse absolue en matière de gestion d’entreprise. C’est un format très plaisant pour les salariés, mais dont la viabilité financière est très variable en fonction des secteurs d’activité et des cultures d’entreprise, par ailleurs certains dommages collatéraux peuvent être constatés.

Publié le 28 février 2025

A propos de l'auteur
Yann NABUSSET
Fondateur du cabinet de recrutement AMALO
Diplômé d'un Master en achats, logistique et distribution. 👨🏻‍🎓
Recruteur sur les métiers techniques depuis plus de 10 ans 🥲
Je parle emploi, recrutement, industrie, logistique et supply chain.
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